Les Timazo - Le Batut

Florence Delorme
et
Pierre Launay

Genre : Roman d'aventure, nouvelle et pièce de théâtre
Thème : Enfants en fuite, Voyage en France, Théâtre
Public : Enfance et Jeunesse
Epoque : Contemporaine.

Les Timazo sont trois. Ils s'enfuient à bord d'un camion volé pour échapper à leur mauvais destin.
Ils rencontrent sur leur chemin, des alliés, des ennemis, des personnages inquiétants, de vrais amis...
À chaque épisode, ils découvrent une nouvelle histoire qu'ils transforment en pièce de théâtre.
Dans Le Batut, ils se cachent dans un centre équestre, et font route vers la mer.
Une aventure d'enfants livrés à eux-mêmes et recherchés par toute sorte de gens...
À mettre d'urgence entre les mains des enfants doués d'imagination !

Pierre Launay

Ce volume contient

Le premier épisode des aventures de Mat, Titi et Zoé.
Fausse couverture Mauvais ViolonLe Mauvais Violon, une nouvelle de Pépé.
Des scènes à jouer d'après Le Mauvais Violon

Extrait 1 - Le Batut

Derrière le petit rideau qui servait de fond de scène, Mat demandait à Zoé, en essayant de masquer son émotion :

– Zoé, tu es sûre que ça va bien se passer ?

– Mais non, Mat, j’en sais rien ! Moi aussi je suis morte de trouille ! Ça marchera jamais ! J’y arriverai jamais !

Mat se mit à gronder :

– Ah non Zoé ! Ne dis jamais ça ! Tu vas y arriver parce que tu es très bonne ! Tu es la meilleure et tu n’as peur de rien !

Pendant ce temps, Titi, en costume à boutons dorés haranguait la foule avec beaucoup d’autorité.

– Approssez, approssez ! N’ayez pas peur, les artiss ne vous feront pas de mal, ze les surveille ! Assoyez-vous s’il vous plait les grands de devant ! Laissez passer les petits enfants ! Ce pestacle est pour eux comme pour les grands ! Un peu de calme, les grands là-bas derrière, ne poussez pas ! Le pestacle des Timazo va commencer. Auzourd’hui ils vont zouer leur grand succès : le Violon du Diable ! Ça fait peur, mais pas trop !

Quasiment toute la population de Traguas était assemblée sous la Grenette. Môssieur Pépé, comme un chien de troupeau, courait tout autour et les encourageait à s’approcher mais en les faisant rire au lieu de leur aboyer dessus. Une grosse joie secouait la foule qui voyait Titi, minuscule sur son tabouret, se hisser sur la pointe des pieds pour s’adresser à elle comme un dompteur à ses fauves.

– Allez, le grand là-bas ! Tu peux pas rester comme ça ! La petite dame derrière, elle voit rien !

Énorme au premier rang des chaises qu’on avait sorties de son café, Noémie trônait. Depuis le matin les Timazo l’étonnaient et la faisaient rire de bon coeur, et les tours d’adresse de Titi l’émerveillaient. Elle n’en revenait pas de le voir, lui si petit, commander à cette foule.

Lorsque tout le monde eut trouvé une place, les enfants devant, les vieux sur les chaises de Noémie, et les autres entassés comme ils pouvaient avec l’aide de Pépé, Titi descendit de son perchoir et disparut derrière le rideau.

Ce n’était qu’un morceau de tissu orange, enfilé sur un manche à balai que deux piquets tenaient en l’air, mais toute l’attention du public se fixa sur lui lorsqu’on entendit une marche de tambour qui semblait venir de très loin et se rapprocher. Le rideau frémissait, puis tremblait de plus en plus fort à mesure que le tambour se rapprochait lentement. Tous attendaient ce qui allait surgir, le rideau était maintenant agité comme par une tempête, un ouragan… Les yeux perdus dans les vagues oranges, chacun imaginait son pire cauchemar ou son rêve le plus merveilleux. Sans doute on allait voir apparaitre la douzième merveille du monde, un feu d’artifice ou le diable en personne !… Mais lorsque le roulement infernal s’arrêta, il n’y avait devant le rideau que Zoé, toute jolie dans un costume de ballerine et tenant entre deux doigts de la main gauche un petit violon, et entre deux doigts de la main droite, un petit archet.

Extrait 2 - Le Mauvais violon (nouvelle)

À travers les branches qui le piquent et le griffent, Tim contemple ce spectacle étrange : un homme aux cheveux longs et bouclés, vêtu d’une veste de velours bleu, joue du violon devant la cage des lions. Son ardeur, sa fougue et la joie de sa musique semblent plaire aux grands fauves, Tim sourit.

– Qu’est-ce qu’il fait ?

– Arthur vient jouer chaque jour pour que les animaux se sentent moins seuls, moins tristes d’être loin de leur pays.

Couchés dans leur cage, les lions regardent le violoniste.

– Ils l’écoutent ?

– Bien sûr ! Ils aiment ça tu sais, chaque jour à la même heure, ils viennent à cet endroit et attendent l’arrivée d’Arthur. C’est beau n’est-ce pas ?

La musique s’envole autour de Tim, les notes rebondissent, virevoltent, explosent dans les buissons, et lui pénètrent dans le coeur comme une bouffée d’allégresse. Plein d’émotion, Il ne bouge plus, il écoute. Quand la musique s’arrête, il a envie de crier « Encore ! » comme quand il était petit. L’homme salue les bêtes et s’éloigne gaiement vers les singes qui crient d’impatience.

Le petit violon chuchote.

– Est-ce que tu as aimé ?

Tim est radieux

– Oui alors ! C’était beau, c’était de la musique… d’émotion ! Tu le connais ?

Le petit violon est heureux et fier.

– Oh oui, c’est avec moi qu’il a appris tout ça, tu vois, je suis un excellent violon !

Tim veut suivre le violoniste mais le petit violon l’arrête.

– Il faut rentrer maintenant.

Avant que Tim n’ait le temps de protester, ils s’élèvent à toute allure dans le ciel. Une phrase tourne dans son esprit, elle s’impose à lui, comme si quelqu’un la répétait dans sa tête « Je suis un excellent violon ! » L’instant d’après il est face à Monsieur Piano.

– Bien, j’espère que tu as compris, mon grand, réfléchis à tout ça et nous prendrons une décision ensemble.

– Heu… Oui, oui ! répond Tim au hasard.

Dès que Monsieur Piano est parti, il pose mille questions à son violon. Où sont-ils allés ? Qui est Arthur ?

Mais le violon ne répond pas. Il a retrouvé son apparence ordinaire de violon. Tim l’appelle, rien ne se passe. Il ne sait plus quoi penser... A-t-il rêvé ? Les griffures sur ses mains lui confirment que non. Il prend son violon dans ses bras, le touche, le caresse, le supplie, rien ne se passe. Il s’énerve, râle, crie, finit par pleurer de déception et de colère.

Cette nuit-là, il fait un rêve où les animaux et la musique se mêlent à cette phrase « Je suis un excellent violon ». Il se réveille fatigué et avec l’envie très forte de revoir le violoniste, Arthur. Sa musique si belle, si gaie qui séduit les animaux, lui trotte toujours dans la tête. Cet homme pourrait lui apprendre le violon sans doute bien mieux que Monsieur Piano.

Extrait 3 - Théâtre

Dans le salon, chez Tim.

Monsieur Piano

– Merveilleux Tim ! C’est très bien ! Parfait, parfait ! Je suis ravi ! Tiens simplement l’archet du bout des doigts, comme ceci ! (Il montre le geste à Tim avec de grands mouvements amples, il ressemble à une danseuse en plein exercice d’échauffement. Tim l’imite dans une sorte de danse de l’archet.) Est-ce que tu sens la légèreté Tim ? Est-ce que tu entends cette douceur dans les notes ? Ah quelle magie, quelle merveilleuse magie !

Tim 

– Oui, oui, j’entends du Vivaldi Monsieur Piano, est-ce que vous l’entendez ? Un morceau qui vole dans nos têtes, vous sentez la joie ?

Monsieur Piano 

– Ah quelle force ! Quelle formidable puissance ! Vivaldi, mon petit Tim est un véritable héros ! Tu as la chance de connaître la musique de ce Maestro ! Allegro ! (Monsieur Piano virevolte joyeusement. Tim le suit chaque fois.) Presto ! (Il accélère.) Adagio ! (Il ralentit. Tim s’arrête d’un coup, Monsieur Piano continue un peu à virevolter)

Tim 

– J’aime Vivaldi ! Vous voulez bien m’apprendre du Vivaldi, Monsieur Piano, maintenant que je l’ai entendu dans ma tête, ça va être facile !

Monsieur Piano 

(Il s’arrête d’un coup.) – Facile ? Facile ? Vivaldi, facile ! Tu as dit facile ? Quelle horreur ! Comment peux-tu croire pareille absurdité ? Comment ? Tu n’es qu’un vermisseau à côté de ce grand maitre et tu prétends le jouer facilement  ? Ah mon jeune ami, tu es bien décevant ! Facile Vivaldi !! Non ! Non ! Non ! Je veux bien entendre beaucoup de bêtises mais celle-ci est décidément énorme !

Tim 

– Excusez-moi, Monsieur Piano... Je ne voulais pas vous fâcher, je croyais... vous aviez dit : il faut entendre la musique, il faut la vivre de l’intérieur, alors comme je l’entendais, que je l’a vivais, je me disais, enfin, je pensais que ce serait plus facile pour travailler ...

Monsieur Piano 

– Travailler ! Travailler ! Voilà ce qu’il faut dire et uniquement cela ! Tu dois travailler, travailler encore et encore et encore... Et encore, alors peut-être qu’à ce moment là je te proposerai un petit, tout petit morceau de Vivaldi. (Il prend un air inquiétant et mystérieux.) Le travail, Tim, le travail, il n’ y a pas d’autre magie que le travail ! À jeudi, jeune homme, réfléchis, réfléchis et tâche de comprendre !

Il sort.

Tim 

– Travailler, travailler..., il est drôle ! Je ne peux pas travailler dans le vide ! Il me faut de la matière, de l’inspiration, il me faut un morceau, une partition ! Et surtout il me faudrait un vrai violon, celui-ci ne veut pas faire ce que je lui demande, il est têtu, il n’écoute rien ! Je veux un vrai violon, sensible à la musique ! Celui-ci est sourd !

Porta
Piccola
sur scène

avec la
Compagnie Acte Un

Porta Piccola
en format numérique

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